Antoine BLOYE. (Paul Nizan) 1933
Un auteur injustement oublié, on sait juste
qu’il a été l’ami de Sartre et Simone de Beauvoir, qui le mentionne dans ses
écrits. Membre actif du parti communiste, il en démissionnera au moment de la
signature du pacte germano-soviétique, en 1939, et rompra toutes relations avec
Sartre et Beauvoir.
Il meurt à la guerre
en 1940.
ANTOINE BLOYE est un
personnage auquel on s’identifie facilement. Fils d’un ouvrier des chemins de
fer et d’une femme de ménage, il suivra ses parents au fur et à mesure de
l’avancée des voies ferrées à travers la France. Excellent élève, il reçoit une
bourse, mais « évidemment » pas pour aller au lycée, quel besoin aurait-il
d’apprendre le latin, et le grec ? Pour lui, ce sera « l’enseignement
spécial », destiné aux enfants d’ouvriers méritants. Au fil des
déménagements, il lui arrivera de côtoyer des élèves promis à de hautes
destinées, comme Aristide Briand (fils d’un cafetier) mais il n’osera jamais par la suite, se
rappeler à leur bon souvenir.
Antoine ira loin. Comme
son père, il suivra le chemin de fer, au fur et à mesure de sa progression à
travers la France. Il deviendra chef des Ateliers de la Compagnie, (le journal
« le Combat » avait même annoncé sa nomination !), et il y aura
aussi des hommes à qui il pourra donner des ordres. Lui et sa femme ont
maintenant un salon de style Louis XV, en velours vert, sa femme voudrait bien recevoir,
une fois par mois, « ces dames d’œuvre », qui s’occupent de donner
des conseils aux femmes d’ouvriers, « qui ne savent pas tenir leur
intérieur »…mais il s’y oppose violemment… « Ces femmes ne
connaissent rien au monde ouvrier ! »
Puis vient la guerre
de 14, les hommes partent les uns après les autres, aux cris de «Vive la
guerre, vive l’armée… ! » et les ateliers que dirige Antoine,
toujours avec la même rectitude, fabriquent des obus, jusqu’au jour où on
découvrira que certains de ces obus sont défectueux, et que, comme il se doit,
ce n’est pas le supérieur d’Antoine, un ingénieur toujours ivre, qui sera accusé de négligence…
Le voilà muté
d’office, en banlieue parisienne, avec très peu de responsabilités et de
travail, il ne s’y plait pas du tout. Il consacrera ses dernières années de vie
à réfléchir à ce qu’il aurait pu faire d’autre, et qu’il s’est refusé, parce
que « ce n’était pas pour lui »…
Un style magnifique,
qui rappelle un peu Zola, la description d’un mode de vie et d’une ascension
sociale qui rappellera des souvenirs à certains d’entre nous.
Anne
https://www.franceculture.fr/emissions/personnages-en-personne/antoine-bloye-ou-la-vie-apolitique